Miloš Karadaglić, jeune guitariste classique, originaire du Monténégro, présente un nouvel album, « Sound of silence ». Sortie le 16 septembre 2019, chez Decca Classics.
La guitare est son instrument de prédilection. A huit ans, Miloš , vivant en Yougoslavie s’y intéresse et se passionne pour celui-ci. Plus tard, il obtient une bourse à la Royal Academy of Music à Londres où il suivra des cours spécifiques. Cette expérience londonienne et cet apprentissage sérieux le propulsent devant la scène.
De concerts en rencontres, après des années d’études, il sort un premier album, intitulé « Mediterráneo », en 2011, qui lui vaut le Gramophone Jeune Artiste de l’année et un Echo Klassik en 2012. Il fera de nombreux spectacles et tournées, cette année là, dans le monde, aux Etats-Unis, en France, au Royame-Uni, au Japon, en Corée, aux Pays-Bas, en Suisse, à Hong-Kong, au Canada et en Australie. Il poursuit son ascension, avec les sorties d’album, « Pasión » et « Latino », en 2012 « Canción », 2013, « Aranjuez », 2014, « Blackbird, The Beatles album », 2016.
Son travail apprécié l’a mené à collaborer avec différents artistes, notamment pour l’album « Blackbird, The Beatles Album », où il signe des duos avec les célèbres musiciens Gregory Porter, Tori Amos, Steven Isserlis et Anoushka Shankar.
Miloš revient sur scène en 2018, au Royal Albert Hall, avec le concerto de guitare que Joby Talbot a écrit spécialement pour lui, « Ink Dark Moon ».
« Sound of silence » est un album chargé d’émotion. Avec douceur, intuition et sincérité, Miloš nous fait entrer dans un monde intime et interroge avec quelques accords, le spectateur : le son du silence, littéralement. Il relate un moment douloureux de sa vie, suite à une blessure. Miloš a été créatif. L’album inclut des pièces de guitare classique et des chansons qu’il écoutait pour s’évader dont une version spéciale de la chanson « Nights in White Satin », et ses versions personnelles de « Sour Times » de Portishead, Street Spirit de Radiohead et « Blue Raincoat » de Léonard Cohen, rejoint dans deux duos par le saxophoniste Jess Guillam. Le son est plus pop, plus novateur.
La musique de Miloš est un appel au voyage. Tous les morceaux sont empreints de douceur et de délicatesse.
Interview, Miloš Karadaglić
-Il est intéressant de voir que vous commencez la guitare très jeune. Comment avez-vous su que ce serait votre instrument de prédilection ?
MK : Ma passion pour cet instrument est venue grâce aux cours. La guitare m’a trouvé plus que je ne l’ai cherchée. J’avais ce besoin de m’exprimer à travers la musique, la danse, le chant. Plus jeune, je n’étais pas très bon au foot. Au Monténégro, ce sport est très important. Tous les enfants jouent au foot. Mais ma voie était ailleurs. Je chantais, je jouais avec une vieille guitare que nous avions à la maison. Voyant mes capacités et mon envie d’apprendre, mon père m’a inscrit dans une école de musique. Au départ, j’ai trouvé l’école assez ennuyeuse. Je voulais plus de liberté et je l’ai donc quittée. A l’époque, il y avait de nombreux troubles au Monténégro, on ne pouvait pas écouter un récital de musique classique partout. Mon père possédait un album du fameux musicien espagnol, André Segovia. J’ai écouté le premier morceau de cet album. C’était le plus beau son que j’avais entendu dans ma vie. J’ai eu un déclic. Ce genre de musique était ce que je voulais pratiquer. A partir de ce moment là, je me suis mis à la guitare classique très sérieusement.
-Quelles sont les étapes de votre parcours ?
MK : Très vite, à l’école de musique, j’étais amené à jouer des morceaux assez complexes. J’ai eu rapidement l’opportunité de réaliser des performances sur scène. Je me sentais très à l’aise devant un public. Cependant, la vie en Yougoslavie, à cette époque, n’était pas facile, c’est ce qui m’a incité à plonger dans ce domaine artistique. Ainsi, j’ai créé mon monde dans la musique, un monde merveilleux. Elle est un cadeau. Je suis réellement tomber amoureux de la scène, j’avais un vrai plaisir à y être. Lorsque je me sentais un peu triste, déprimé, je me suis toujours remémoré ce moment magique, ces sensations fortes qu’elle procure, ce qui m’a poussé à continuer. A l’âge de 16 ans, j’ai décidé de devenir professionnel, malgré le manque de possibilité dans mon pays. Mes parents m’ont dit : « Si tu veux jouer de la guitare classique, tu dois être le meilleur. » Ils ont cru en moi et m’ont donné confiance. J’étais très jeune et je ne savais pas encore ce qui était bien ou mal. Je croyais en ma volonté de devenir musicien, guitariste. Londres était le lieu idéal. J’ai fait des vidéos de mes meilleurs morceaux et je les ai envoyées pour auditionner. J’ai été accepté dans une école. J’avais 17 ans, le monde là bas, était totalement différent. L’académie de musique n’était pas facile mais j’étais déterminé. J’ai travaillé dur.
-La guitare classique procure énormément d’émotions. Quelle différence faites-vous entre le classique et le moderne ?
MK : Chaque genre de guitare a une beauté particulière mais j’ai toujours été attiré par la guitare classique car c’est par là que l’on commence. Elle représente le modèle de base. Cependant, communiquer entre les différents genres est merveilleux. J’ai participé à un immense showcase pour Apple music, à la Silicon Valley, avec le groupe de rock Florence and the machine. C’était une expérience surprenante. Je pense que je suis libre dans mes choix musicaux. L’important est d’être ouvert et de composer des musiques pour un large public. Je crois au mélange des styles, au métissage. C’est ma réflexion de ces dernières années. Après cette période de succès, j’ai connu le trouble, la fatigue et les doutes. Ce temps m’a permis de me poser de vraies questions et je le partage aujourd’hui. Le courage et la volonté m’ont tiré de ce sombre passage. J’ai décidé de me battre encore. J’ai trouvé ma musique lorsque j’ai retrouvé l’envie. Cet album a été mûrement réfléchi pendant deux ans, qui correspondent à la durée de mon silence, durant lequel je ne pouvais pas jouer. J’ai écouté énormément de musique pendant cette période. Cela m’a rendu plus ouvert et plus curieux. Le genre, classique, contemporain ou autre est devenu de moins en moins important. Seule la musique compte. Je souhaite simplement jouer et faire de la musique. « Sound of silence » contient des morceaux classiques, avec des influences de rock alternatif, d’indie, de pop. J’ai pris énormément de plaisir à créer et composer.
-Quels sont vos influences, vos références ?
MK : Difficile…il ya de nombreux musiciens fantastiques. Lorsque j’étais jeune, j’écoutais John Williams, André Segovia. Pour chaque artiste et dans n’importe quelle forme d’art, il est important de se trouver et de s’épanouir. Au premier mouvement de danse, à la première note de musique, on reconnait le talent, la facilité, le don d’un artiste ou non. Chaque personne à ses qualités. Un artiste est toujours créatif.
-Comment abordez-vous le choix des reprises classiques comme Piazzola ? Quel est votre processus créatif pour vos morceaux originaux, tel que « The book of love » dans votre dernier album ?
MK : Piazzola est un musicien fantastique. Je l’ai découvert lorsque j’étais étudiant. En allant au Virgin Megastore de Londres, j’ai écouté un album, un quartet, Gidon Kremer et un tango. La musique de Piazzola est surprenante et puissante.
« The book of love » est une chanson iconique. Elle a une histoire spéciale et marque un moment magique. J’ai du tout construire pour ce morceau. Elle est en quelque sorte une berceuse, une chanson douce.
-Ce dernier album est l’aboutissement d’un travail réfléchi. A l’écoute nous ne ressentons pas forcément un silence mais plus un bien être, un appel à l’évasion. Cette antinomie est révélatrice « Sound of silence », quel message voulez-vous faire passer ?
MK : Le titre est antinomique. Je crois au silence et nous en avons besoin dans ce monde moderne. Il y a tant de négativité qu’il est difficile de trouver la paix. Le moment de silence en musique se situe entre deux notes. Il est magique. Le silence est pour moi le début d’un nouveau son.
« Sound of silence »,
Miloš Karadaglić
Nouvel album, guitare classique
Decca Records, Universal Music France
Sortie le 16 septembre 2019
@Miloš Karadaglić, Lars Borges
Bel article, très intéressant qui permet de comprendre et de connaître un peu plus ce guitariste talentueux
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Merci
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