François Delebecque, artiste photographe et sculpteur, présente l’exposition « La jupe et le marteau », comprenant un grand nombre d’œuvres, à la friche culturelle et artistique Anis Gras, à Arcueil, en région parisienne, du 5 avril au 6 mai 2019.
Anis Gras est une ancienne usine devenue un centre d’art, une résidence d’artistes, de comédiens, de troupes.
En quelque sorte, l’exposition est une rétrospective, présentant aussi des travaux les plus récents.
François Delebecque a imaginé, avec Garance Cappatti, commissaire d’exposition, la disposition de ses œuvres. Trois salles immenses sont à disposition, permettant la visibilité d’œuvres importantes. Une maquette a été nécessaire pour réaliser ce travail. Cabinet de curiosités, sculptures avec des costumes en carton, photos, toutes les œuvres ont une place étudiée.
La Jupe fait partie de la dernière série : des autoportraits en jupe. Le Marteau, de la série précédente, intitulée « Petites Tortures Quotidiennes ».
François Delebecque commence par la photographie « fine art » traditionnelle (argentique ou numérique), puis l’illustration de livres, des séries policières, publiées chez Gallimard, et des livres pour enfants dont il signe aussi les textes, publiés aux Editions des Grandes Personnes. Il réalise parallèlement des courts-métrages en relation avec les chariots ou autres structures métalliques, et enfin, il réalise des sculptures en acier. Son univers onirique nous entraîne dans un monde bien particulier où le réel se confond avec l’imaginaire. Il s’agit d’animaux, de formes primaires, d’êtres humains, de natures mortes et de « machines »…
Il participe à des projets artistiques, de danse, en réalisant un film de commande du spectacle Mito Mito pour Georges Appaix et Pascal Houbin, (Correspondances avec Trônes), diffusé après le duo dansé.
L’exposition permet de montrer plus de 130 photographies, et différentes œuvres, dont les deux trônes réalisés pour le film « Correspondances avec Trônes », puis les séries « Les Songes de l’Ours », « Nocturnes Végétales », « Gorilles », « Rêves de plage », « Marfas, Texas », « les 7 Chariots », mais aussi des séries de nus.
Une salle est dédiée au corps, avec les séries « Memoradum Olympique», « Petites Tortures Quotidiennes », avec la diffusion des courts-métrages, « L’Hypothèse du chaud» sur la chanson de Mistinguett « Il m’a vue nue ».
Certaines œuvres font partie de collections permanentes, en France, à la Fondation Cartier, à la Bibliothèque Nationale de Paris, et à l’étranger.
Interview de François Delebecque
-Vous avez jusqu’ici imaginé de nombreuses séries, les chariots, Marfa,Texas…comment avez-vous eu l’idée de cette dernière « La Jupe et le Marteau », polyptyque de l’intime, où vous présentez à la fois des sculptures, des photographies et des vidéos ?
FD : Pour cette série, je suis partie d’un sentiment. J’ai été séduit par la jupe que portait une amie, grise et plissée. Je l’ai essayée, elle m’allait parfaitement et je suis parti sur cette série d’autoportraits avec différentes jupes -sélectionnées- où les questions de genre se mêlent effrontément avec la nature et la représentation de soi.
« Le Marteau » correspond à un des instruments en carton ondulé qui initie la série « Petites Tortures Quotidiennes». Je travaille par pulsion. A ma manière, j’avais besoin de représenter les misères que l’homme (ou la femme) peut faire à l’homme (ou la femme). Les tortures ont existé au Moyen-âge, elles sont réalistes. Les armes sont en carton, les personnes sont masquées et leurs corps, peints en rouge, souvent nus, comme une tribu imaginaire qui sévit subrepticement dans mon atelier. J’utilise pour mes sculptures du carton ondulé et du fer à béton.
Il y a une grande diversité dans mes œuvres. Je suis mon instinct et je le revendique. Je souhaiterais aussi montrer cette exposition dans son intégrité (chariots, photographies, sculptures, films) à Paris intramuros, et dans d’autres lieux qui me permettrait de montrer autant d’œuvres à un large public.
-Trouvez-vous un rapport entre une jupe et un marteau ? Y-a-t-il, derrière cette association de mots, un message ?
FD : Il n’y a en tous cas pas de message politique. C’est l’association naturelle de deux photos de séries récentes qui a créé le titre. La jupe et le marteau sont dissociés, sans lien véritable, chacun venant de sa série propre; la jupe venant de la jupe plissée grise dont je suis tombé amoureux et le marteau d’un instrument de frappe qui intervient-démesuré et en carton- dans la première image de la série.
La série « Petites Tortures Quotidiennes » est un peu ironique dans son traitement, mais découle d’une consternation des absurdités de certains comportements humains destructifs à l’encontre de lui-même. Cette série est mixte, avec la femme et l’homme en terme d’égalité de tortures -de carton- subies.
-Vous abordez dans vos travaux le corps de manière formelle ou narrative. Est-il pour vous au centre de la création artistique ?
FD : Le corps, loin d’être seulement formel, est notre unité centrale. Il est au centre de la création. Sans lui, de toute évidence nous n’existons pas et tout passe par lui : les sensations, le désir, le plaisir, la réflexion, tout ce qui fait notre essence. Le fait d’être amoureux m’élève et me transporte. Ainsi, je rapporte cela au corps, au toucher, au tactile. La danse permet de voir, par exemple, que le corps est chargé de sentiments. L’aspect de ritualité le plus simple est celle de l’écoute de son corps.
J’ai peint le corps en rouge, pour cette série, non pour le masquer mais pour le révéler. Les notions de pudeur et d’impudeur sont ainsi abolies. Le naturel devient évident. Le choix de la couleur rouge de terre battue vient d’un rapprochement que j’ai fait avec une tribu. J’ai été très inspiré par les tribus photographiées par Martin Gusinde, au 19eme siècle, en Terre de Feu. Le thème des tribus est un thème récurrent, à différents niveaux, dans le monde artistique, une référence. Le corps est dans toute mon œuvre. Il est effectivement au centre de ma création.
«La Jupe et le Marteau »
François Delebecque
Exposition du 5 avril au 6 mai 2019
Friche culturelle et artistique Anis Gras
55 Avenue Laplace – 94110 Arcueil
Exposition dans le cadre du Mois de la Photo-Off 2019