(Spiderman, oil/linen, 2016)
Artiste peintre, natif du Mexique, Francisco Rangel présente aujourd’hui la série, intitulée « In-cognito-Ys », à la Galerie Deux6, à Paris, du 10 janvier au 7 février 2018.
La galerie Deux6 qui met en lumière les artistes émergents, présente pour la première fois à Paris ce dernier projet coloré de l’artiste.
Il s’agit en effet d’un travail « collaboratif », puisqu’il reproduit certains dessins de ses enfants en fond de toile et y ajoute un super-héros, manipulé par les mains d’enfants. Ce dernier parait si vrai, que la peinture – car il s’agît intégralement de peinture à l’huile – est largement dissimulée au point que le spectateur semble voir une photographie.
Francisco Rangel a commencé à exposer ses différentes séries en Espagne, au Mexique et à Londres où l’exposition sur les ponts a connu un vif succès.
Superman est une figure américaine de fiction devenue une image connue dans le monde entier. Francisco Rangel l’utilise différemment. L’idée première de cette série lui est venue soudainement en observant les jouets autour de lui. Le super héros est ici un personnage admiré par les enfants mais l’artiste banni le côté publicitaire de l’objet. Le héros est une figure culturelle qui traverse les époques et les sociétés, récurrente dans l’histoire. Son apparence et ses combats varient selon le contexte culturel.
Son œuvre est riche et variée, passant facilement d’une série à une autre sans lien, sans ressemblance : « Col tempo », « Caché », « Empreintes du cinéma mexicain », « Lucha libre » exposée à Barcelone en 2015.
L’artiste parle d’instinct créatif. Architecte de formation, il bascule à un moment donné pleinement dans le monde artistique et choisit d’en faire son métier. Ainsi, l’instinct se combine à la réflexion pour donner naissance à des œuvres, des séries inspirées d’une idée, d’une image, d’un voyage.
Cette nouvelle série « In-cognito-Ys » mixe fiction et réalité. L’ambiguïté est peut-être dans le fait que ce personnage de super-héros, quelque part médiatique, doit rester pourtant aux yeux des enfants un personnage secret, arrivant au bon moment, la définition même du héros pour eux.
Francisco Rangel associe dans sa création tous ces paramètres et laisse apparaître l’artiste, le père, le protecteur, le héros.
Interview de Francisco Rangel
-Comment avez-vous commencé la peinture, le dessin ?
FR : J’ai commencé à m’intéresser à la peinture et au dessin dès mon plus jeune âge, 6 ans, à l’âge où l’on commence à bien utiliser un crayon. J’ai continué jusqu’au jour de mes onze ansles cours de dessin qui m’ont permis d’acquérir la technique.
J’ai poursuivi mon apprentissage seul, en autodidacte, et au contact de maestros à Queretaro (Santiago Carbonel) puis plus tard à Madrid (Guillermo Muñoz Vera). Architecte de formation, j’ai d’abord travaillé à la réhabilitation de monuments historiques. Les deux activités se combinent jusqu’au jour où l’art devient de plus en plus présent dans ma vie et pressant. Le professeur qui me suivait à l’époque m’a convaincu de voyager et de me lancer. J’ai ainsi abandonné mon métier d’architecte pour dédier mon quotidien à l’art.
J’ai d’abord peint au Musée du Prado, à Madrid, comme copiste afin d’expérimenter les techniques anciennes (tempura) et de gagner encore en technicité.
La peinture est un support artistique comme le cinéma, le théâtre, la littérature. Elle permet d’expérimenter une palette large d’émotions. L’expérience de vie nourrit aussi la créativité. L’expérience doit être agréable et enrichissante pour l’artiste comme pour le spectateur.
-Natif du Mexique, le voyage a-t-il influencé votre travail artistique ? Avez-vous su immédiatement que le dessin était votre centre d’intérêt, votre moyen d’expression ?
FR : Non, je n’y ai pas vraiment réfléchi. Le voyage m’a surement ouvert l’esprit, les cultures sont différentes, les paysages, les gens. Une part inconsciente doit se ressentir dans mon travail.
La peinture est devenue mon moyen d’expression premier lorsque j’ai décidé d’en faire ma principale activité. J’avais cette dichotomie. Le déclic est arrivé en voyageant en Italie, en Espagne, en Grande- Bretagne.
L’émotion qui passe à travers les tableaux est une émotion visuelle, technique. La plus remarquable est la vie quotidienne, la connaissance des cultures de façon différente.
-Quelle est votre technique : pinceaux, peinture, feutres, crayons?
FR : J’utilise la peinture à l’huile, sur toile ou bois. C’est une technique classique, ancienne, toujours efficace. Mon ami professeur m’a dit un jour : « le secret de la peinture est qu’il n’y a pas de secret, mais de mauvaises compréhensions ».
J’ai choisi les dessins de mes enfants réalisés aux feutres ou à la peinture. Cette série marque l’expérience de mes enfants et mon expérience de père.
La révélation a été immédiate. La vision d’une figurine posée sur un dessin un jour a été le déclencheur et l’émotion était si grande que j’ai voulu partager avec mes enfants un moment de création. Le sujet traite aussi d’un thème important pour les enfants. Le super-héros
personnage admiré de tous, sauvant les gens du danger, met en avant la notion de bien et de mal. Il apparaît alors comme un protecteur, un défenseur. Inconsciemment, le super-héros est placé dans mes œuvres, au premier plan. Apparaît ensuite le dessin de mes enfants.
Néanmoins, le super-héros reste un personnage de jeux, les enfants ne doivent pas se perdre dans cette histoire.
-Comment constituez-vous vos séries si différentes, « Caché », « Lucha libre », aujourd’hui« In-cognito-Ys » ?
FR : J’aime profiter, sortir, aller au cinéma, voir des expositions, des installations.
Après un Master en art contemporain à Madrid, l’art m’a toujours attiré. Le processus créatif se compose d’une idée et d’une réflexion. La série sur le cinéma a commencé comme un projet et a ensuite été exposée à Milan en 2004, ma première exposition individuelle en Europe.
Je me suis intéressé ensuite aux paysages urbains, auxquels je reste toujours sensible, notamment les ponts, et j’ai exposé à Londres. L’exposition a été bien reçue, à l’époque, en 2007.
Parallèlement, j’ai travaillé sur le cinéma mexicain. Mon travail a été présenté en 2006 au Mexique et au salon du livre de Paris en 2009.
La série sur les nus, « Caché » m’a permis d’entrer dans un univers différent, amusant. J’ai collé des plumes sur les tableaux. Le spectateur est alors acteur du processus, directement sollicité.
Parallèlement, intéressé par les catcheurs mexicains, j’ai travaillé sur la série des super-héros. La connexion s’est faite assez rapidement car ils sont des super-héros tout en étant de vrais personnages. Au Mexique, les super-héros existent. Ce sont des personnages masqués qui luttent contre l’injustice. Cela a abouti à cette série avec mes enfants.
J’ai toujours un projet. Je ne cherche pas à faire la même chose.
La peinture est un moyen d’expression, un médium. Ce n’est pas un objectif. L’important est pour moi de partager une émotion esthétique, de jouer avec différents registres, de la simplicité pragmatique du dessin d’enfant à la peinture hyper réaliste, et de partager ce moment de création avec mes enfants, qui commencent à s’ouvrir au monde, à s’exprimer.
-Que voulez-vous dire par « In-cognito-Ys », derrière chaque individu se cache un enfant, d’où le super-héros, figure positive héroïque, traversant les époques? Différentes interprétations sont possibles, quelle est votre version ?
FR : Les super-héros sont normalement masqués. Ils se cachent et apparaissent au bon moment pour sauver les gens des « méchants ». Les comics dans l’art ont toujours du succès,
notamment en 2017 où différents événements ont lieu autour d’eux. Sans doute a-t-on besoin qu’ils nous rassurent. Le titre « In-cognito-Ys » s’étudie et se décompose. Il y a la notion de « cognitif », apprentissage, de « toys », de jouets et « incognito », de supers-héros dissimulés.
Mes enfants apprennent à connaitre cette culture populaire mais de façon maîtrisée, sans violence.
Pour moi, chaque projet est un moment d’aliénation. Je suis toujours en recherche. Chaque projet est une expérience.
« In-cognito-Ys »
Francisco Rangel
Du 10 janvier au 7 février 2018
Vernissage jeudi 11 janvier 2018, 18h
Galerie Deux6
66 Avenue de la Bourdonnais, 75007 Paris