(New York Brooklyn Bridge Lianes)
Artiste photographe, Chris Morin-Eitner expose ses oeuvres photographiques à la galerie W à Paris, du 11 mai au 15 juin 2016.
La galerie W, située à Montmartre à Paris a pour particularité de recevoir des artistes d’aujourd’hui mêlant plusieurs talents, de la photographie en passant par la peinture ou encore la réalisation d’installations ou de vidéos. Chris Morin-Eitner fait partie des artistes permanents de la galerie.
Les photos sont des montages, présentant des animaux sauvages et des monuments connus.
Le photographe s’est inspiré des paysages du Cambodge lors d’un voyage. Les temples Maya sont alors apparus comme une révélation. Les ruines recouvertes par la végétation ont donné l’idée première de la série.
Couleur, ambiance, nature, l’artiste met en lumière un paysage paradoxal. Il s’agit ici de retrouver un monde plus sauvage, qui aujourd’hui est trop étouffé par la ville, les constructions. Cette idée a donné naissance à une série imposante et attrayante.
Le spectateur plonge alors dans un monde qui le tente. C’est par le paradoxe qu’il est convaincu de la force de ces oeuvres. Que font les girafes devant le « New York Brooklyn Bridge Lianes », comment est-ce possible, la Tour Eiffel entourée de végétation tropicale?
Dans ce sens, Chris Morin-Eitner a trouvé son langage artistique, le photo-montage. Artiste, il défend aussi une cause actuelle: le réchauffement climatique.
Interview de Chris Morin-Eitner
-Comment avez-vous commencé la photographie?
CM-E: J’ai commencé, il y a longtemps, par prendre des photos en noir et blanc, en argentique. J’ai toujours été fasciné par de grands photographes tels que Cartier-Bresson, Helmut Newton, Richard Avedon, … .J’ai commencé par regarder ces images, puis j’ai fait de la photo tout d’abord par plaisir. Après avoir obtenu mon diplôme d’architecte, j’ai monté ma propre agence de photos d architecte (Artimage). Mais la photographie m’a toujours plu, je n’ai donc jamais arrêté. L’architecture me permet d’être structuré dans mon travail artistique.
-Vos oeuvres paraissent à la fois surréalistes et vivantes,quelle est votre technique?
CM-E: Ce sont des collages numériques. Mon sujet est vraiment la ville, avec le choix d’un bâtiment connu. L’image de base reste la ville, puis je place des fleurs, des animaux… Je commence par faire un croquis. Une fois la composition réalisée, je commence à travailler mon image.
-Vos oeuvres sont le reflet de vos pensées, vous accordez beaucoup d’importance aux paradoxes notamment, en choisissant le titre de votre série « Il était une fois demain », voulez-vous dire au spectateur « je vais vous raconter ce qui va se passer demain »?
CM-E: Il s’agit d’un futur proche. Dans mes photos, il y a des tours qui n’existent pas encore. Je les ai inventées. Nos vies sont envahies. J’ai une anticipation artistique, étayée par des lectures sur Hubert Reeves sur la construction de l’univers. On ne sait pas comment cela va évoluer. Je suis fasciné par les temples maya au milieu de la jungle. Il faut penser que les villes ne sont pas éternelles et risquent de s’engloutir. Les ruines sont en quelque sorte poétiques.
J’ai visité les temples Maya au Cambodge, envahis par la végétation, cela m’a inspiré. Puis, peu de temps après, j’ai visité Dubai. Je suis passé d’un paysage naturel et vert à un paysage nouveau, venant d’être construit. Il y a quarante ans cette ville n’existait pas. A ce moment là, je me suis posé la question sur l’évolution des villes. Est-elle définitivement provisoire? Y aura-t-il dans le futur une ville plus grande ailleurs?
Cette vision des deux mondes m’a permis de créer une oeuvre avec des paradoxes. A travers mes oeuvres ont est ailleurs. Mais ce n’est pas une apocalypse, c’est joyeux et coloré. Je suis définitivement optimiste. C’est une continuité, une renaissance.
-Le thème que vous choisissez est bien particulier, la fôret tropicale dans la ville: est-ce purement esthétique ou y-a-t-il une volonté de replacer la nature dans ce paysage construit?
CM-E: Nous sommes en plein réchauffement climatique. La végétation prolifère dans nos villes. Pour des raisons esthétiques, j’ai choisi de réunir ces deux mondes: la construction et la végétation. Il y a une logique dans ces images. On y voit des palmiers, des bananiers, des fleurs…des formes généreuses, exubérantes. Nos villes sont devenues des zones tropicales.
-Dans votre travail restez-vous d’abord un artiste avant d’être le défendeur de la nature, de la planète en participant à la Cop21, en traitant le thème du climat?
CM-E: Je suis un artiste. J’ai donc un mot à dire à travers mon art. Je suis un activiste poétique voulant faire évoluer les pensées. Je suis un urbain qui aime la nature, avec cette envie de reconnection à quelque chose de plus pur. J’aimerai un peu plus de folie dans la ville, que la végétation se prolifère tout en la contrôlant. Mes oeuvres montrent ce paradoxe dans un décor coloré. Il faut oser et moins contrôler, dérèglementer la réglementation. L’idée de tout contrôler dans notre société est asphyxiante. Il faudrait oser laisser la nature proliférer naturellement, sans trop de dessin, qu’elle nous dépasse, nous envahisse.
« Il était une fois demain »
Chris Morin-Eitner,
Exposition du 11 mai au 15 juin 2016
Galerie W, Montmartre
44 rue Lepic, 75018 Paris
« La jungle des paradoxes » par Anne-Marie Fièvre
(Paris jungle Tour Eiffel/ 2010)